de V2F le Dim Juil 11, 2004 2:38 pm
Avertissement : Cet article ne s'intéresse pas précisément aux différentes techniques utilisées dans la chirurgie du kératocône. Il vous donne des informations utiles sur la greffe de cornée, en général. Pour la chirurgie spécifiquement « KC » veuillez consulter le site ou les autres forums ci-dessous.
Vincent
Sources : Faculté de Médecine / Université Paris 5 / Paris 2002
Introduction
C’est la plus ancienne greffe de tissu réalisée avec succès chez l’homme (1887 – Von Hippel).
Elle consiste à remplacer un fragment de cornée opaque par une cornée saine, transparente, venant d’un donneur. Seule l’homogreffe est possible actuellement, tous les essais d’hétérogreffe ou d’utilisation de matériaux artificiels s’étant soldés par des échecs.
Particularités de la greffe de cornée
¤ La cornée est un site privilégié pour la greffe :
- tissu conjonctif compact,
- pas de vaisseau ni lymphatique,
- peu de cellules,
- d’où un conflit immunologique réduit.
¤ Le rejet, s’il survient, est très rapidement décelé :
- par le patient (baisse visuelle),
- par le médecin par un simple examen clinique,
- et donc précocement traité.
¤ Le taux de succès en termes de survie du greffon à cinq ans est élevé, variant de 60 à 90%.
¤ La technique chirurgicale en est simple, parfaitement codifiée, accessible à tout opérateur rompu aux techniques microchirurgicales :
- elle consiste à prélever par trépanation circulaire une rondelle de la cornée pathologique du receveur, d’un diamètre variable (le plus souvent de 7 à 8 mm) que l’on remplace par une rondelle de diamètre identique de cornée saine, provenant d’un donneur. Cette rondelle cornéenne est suturée à la cornée du receveur par un sujet ou par des points séparés de fil non résorbable,
- il est possible au cours de cette greffe de combiner d’autres chirurgies si nécessaire, telle que l’extraction du cristallin avec mise en place d’un implant intraoculaire ou le traitement chirurgical d'un glaucome,
- le traitement postopératoire comporte une corticothérapie locale (collyre corticoïde),
- le surjet ou les points sont laissés en place environ un an,
- en cas de rejet, on intensifie la corticothérapie locale et on administre :
* ciclosporine : 5 à 6 mg/kg/jour pendant trois à six mois ou mieux collyre à la ciclosporine 2%,
* corticothérapie générale pendant quelques mois.
Principales indications de la greffe de cornée
À priori toutes les affections pouvant laisser à titre de séquelle une opacification cornéenne avec baisse d’acuité visuelle.
A. Séquelle de traumatisme perforant de la cornée :
- accident du travail,
- accident domestique : loisirs, jardinage, bricolage,
- accident de voiture (pare-brise),
- agression (pistolets à grenailles) dramatique car le plus souvent bilatéral.
B. Brûlures chimiques, en particulier par bases.
C. Dégénérescences cornéennes (30 à 40% des greffes de cornée) :
- essentiellement le kératocône, affection cornéenne débutant chez l’enfant ou l’adulte jeune, entraînant un amincissement progressif de la cornée, responsable d’un astigmatisme irrégulier puis d’opacités cornéenne,
- plus rarement, une dystrophie cornéenne héréditaire.
D. Kératites
- en particulier kératite herpétique (5% des greffes de cornée), toujours grave car récidivant ; il nécessite un traitement de couverture par antiviral,
- abcès de cornée bactériens,
- kératite amibienne (port de lentilles),
E. «Dystrophie bulleuse» de la personne âgée, dûe à une perte de cellules endothéliales cornéennes, de plus en plus fréquente (45% des greffes de cornée) du fait de l’augmentation de l’espérance de vie ; elle peut être secondaire :
- à des chirurgies intra-oculaires itératives : glaucome, cataracte ; elle est devenue beaucoup moins fréquente après chirurgie de la cataracte avec les techniques actuelles d’extraction du cristallin par phako-émulsification avec implantation en chambre postérieure,
- à l’altération constitutionnelle des cellules endothéliales : « cornéa guttata », responsable avec l’âge d’une perte progressive des cellules endothéliales.
Pronostic
A. Résultats anatomiques et fonctionnels à long terme
La greffe de cornée donne de bons résultats anatomiques et fonctionnels dans plus de 2/3 des cas, avec un résultat durable et à long terme la conservation d’une cornée transparente et d’une bonne récupération visuelle.
B. Complications
Elles sont rares
1. retard d’épithélialisation du greffon : c’est le cas en particulier après brûlure cornéenne, notamment par base ; il met en jeu la transparence du greffon et sa survie, ce qui explique le très mauvais pronostic des kératoplasties transfixiantes dans cette indication.
2. défaillance précoce de l’endothélium du greffon : elle entraîne un œdème cornéen précoce (quelques jours) ; le plus souvent, elle est en rapport avec une altération préexistante de l’endothélium du donneur non repérée lors du contrôle avant conservation, ou alors elle est provoquée par une technique défectueuse de conservation : c’est pourquoi le contrôle endothélial du greffon est essentiel avant la greffe.
3. rejet immunitaire ou "maladie du greffon" :
- il se manifeste au début par un œil rouge et douloureux, une baisse d’acuité visuelle, l’apparition de quelques précipités sur la face postérieure de la cornée à l’examen à la lampe à fente.
- à ce stade, il est le plus souvent rapidement régressif sous l’effet d’une corticothérapie locale et/ou générale.
- en l’absence de traitement, l’endothélium s’altère progressivement. Il ne remplit plus son rôle physiologique et un œdème envahit progressivement le stroma cornéen avec une baisse visuelle, puis toute l’épaisseur de la cornée. A ce stade, le traitement est souvent dépassé, l’œdème est persistant, une vascularisation s’installe dans le greffon. La vision est effondrée.
- il survient le plus souvent à partir de la troisième semaine après la greffe, plus fréquent dans les premiers mois, devient négligeable à partir de la première année post-greffe, mais peut néanmoins à distance, jusqu’à 20 ans après la greffe.
On doit donc en terme de résultats distinguer deux groupes de greffes ou de patients receveurs :
¤ les greffes à faible risque de rejet :
- cornée non vascularisée,
- première greffe,
- petit diamètre,
- adulte,
- le taux de survie à 5 ans est de 85 à 90%, elles ne nécessitent aucun traitement immunosuppresseur ni corticoïde général adjuvant.
¤ les greffes à haut risque de rejet (20%) qui associent un ou plusieurs facteurs de mauvais pronostic :
- vascularisation cornéenne,
- grand diamètre,
- greffes itératives,
- jeune âge <12 ans (taux de survie à 5 ans de 50 à 60%),
- récidive infectieuse (herpès),
- elles nécessitent un traitement préventif par collyre à la ciclosporine 2%, ou cyclosporine par voie générale et/ou corticothérapie générale.
4. récidive de la maladie causale :
a) récidive herpétique, fréquente (le virus est resté dans le ganglion de Gasser) ; pour cette raison, un traitement antiviral général (Zovirax® ou Zelitrex®) maintenu pendant plusieurs mois est systématique dans cette indication.
b) dystrophie bulleuse, la raréfaction cellulaire de la cornée receveuse périphérique restée en place empêchant de vitaliser convenablement le greffon et entraînant rapidement la réapparition de la maladie bulleuse œdémateuse.
c) reprise du kératocône : si la greffe est de trop petit diamètre n’englobant pas toute la cornée malade, le kératocône continue d’évoluer, ce qui nécessite une deuxième greffe plus grande.
5. hypertonie oculaire : elle peut entraîner des dommages irréversibles du nerf optique et du greffon. Précoce ou tardive, c’est une des complications qui pose le plus de problème dans les suites d’une kératoplastie. Son traitement est médicochirurgical et souvent difficile.
6. Astigmatisme important
Le résultat visuel d’une greffe de cornée dépend de la transparence du greffon, mais aussi de la régularité de la courbure cornéenne post-opératoire.
La greffe de cornée, de part l’incision circulaire et des sutures qu’elle comporte, favorise la survenue d’un astigmatisme. Parfois très important, il peut compromettre le résultat visuel d’un greffon pourtant transparent.
Une bonne technique chirurgicale permet d’éviter des astigmatismes trop importants.
Points essentiels
¤ Le taux de succès en terme de survie à 5 ans du greffon est variable selon les indications (60 à 90%).
¤ Les facteurs de mauvais pronostic sont :
- la pathologie cornéenne primitive sévère ou récidivante (brûlure cornéenne, kératite herpétique),
- la néovascularisation du lit receveur,
- le diamètre du greffon,
- le jeune âge du receveur (<12 ans).
¤ Les échecs des greffes de cornée sont dus à de nombreux facteurs, souvent associés : le rejet immunitaire reste cependant la principale cause d’échec.
Dernière édition par
V2F le Lun Juil 12, 2004 1:29 pm, édité 1 fois.
KC: Non / OG=9/10 OD=0,05/10 Corrigés--- Bonne MAVAC !... =^.^=